La Polyarthrite rhumatoïde

Touchant en majorité les femmes entre 30 et 40 ans, la polyarthrite rhumatoïde est l’un des rhumatismes les plus connus. Si elle n’est pas traitée, elle peut mener à une destruction progressive des articulations.

Selon une étude Epi-Phare menée en 2019, 385 919 cas de polyarthrite rhumatoïde ont été identifiés en France. On estime que 5 200 nouveaux cas surviennent chaque année et que cette maladie douloureuse chronique des articulations touche environ 0,5 % de la population, informe Vidal. 

“C’est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques”, confirme Charley Cohen, rhumatologue, ancien chef de clinique de la faculté de médecine de Paris et auteur de Vivre sans douleur, quel bonheur – édition Guy Trédaniel, précisant que la maladie touche environ trois femmes pour un homme. 

Maladie auto-immune aux origines inconnues, il arrive que la polyarthrite rhumatoïde soit prise à tort pour de l'arthrose. La méconnaissance de ses signes peut alors sérieusement retarder le diagnostic et favoriser la destruction articulaire. “Plus on agira vite, plus on pourra soulager la douleur et éviter l’aggravation de la maladie ”, explique le rhumatologue.
 

Des douleurs dans les doigts et les poignets

L'arthrite, c’est l’inflammation d’une articulation. Et on parle de polyarthrite rhumatoïde lorsque cette arthrite est localisée sur plusieurs articulations, de façon bilatérale et symétrique. A la différence de l'arthrose où la douleur est mécanique, aggravée par les mouvements, dans la polyarthrite rhumatoïde la douleur est inflammatoire et apparait au repos. 

“C’est une maladie auto-immune : le système immunitaire se retourne contre l’organisme et les articulations. Les auto-anticorps appelés anti-CCP, spécifiques de la maladie sont dirigés contre les antigènes citrullinés. Et c’est ce qui déclenche l’inflammation de la membrane synoviale qui tapisse les articulations”, explique le Dr Cohen. En entraînant une production de liquide synovial, l’inflammation fait gonfler l’articulation.

L’apparition de ces auto-anticorps apparaissent des années avant les premiers signes cliniques, informe l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). La polyarthrite rhumatoïde peut alors rester imperceptible longtemps, jusqu’à la première poussée.

“En général, les personnes touchées font état d’un gonflement et d’une douleur des doigts, des poignets, des genoux ou des orteils pendant la nuit. Cela peut même les réveiller le matin. Contrairement aux personnes atteintes d'arthrose, les personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde ne souffrent pas dans le bout de leurs doigts, c’est-à-dire entre la 2 ième et dernière phalange, contrairement à l’arthrose et au rhumatisme psoriasique”, détaille le rhumatologue. Un enraidissement matinal des membres peut durer plusieurs dizaines de minutes, et s’accompagner d’une fatigue.

Avec le temps, la maladie s’étend à d’autres articulations et évolue par poussées avec périodes de rémission. Et à terme, la destruction de l’articulation va se voir sur les radiographies avec des érosions et des pincements articulaires. Peut alors survenir un phénomène de “mains tordues”.

Selon Vidal, on estime que la polyarthrite rhumatoïde est invalidante chez 20 à 25 % des patient.e.s. Pour enrayer cette destruction des articulations, il est impératif de diagnostiquer précocement la maladie, martèle le Dr Cohen. “Avec la prise de sang, on cherchera une inflammation évaluée par une augmentation de la CRP, et s’il y a présence d’auto-anticorps anti-CCP spécifiques de la maladie ou de facteurs rhumatoïdes moins spécifiques”. Ces marqueurs de l’inflammation immunologique peuvent apparaître des mois voire des années après le début des symptômes mais leur absence n’élimine pas le diagnostic surtout au début de la maladie.

Du fait de la densité des os qui diminue chez les personnes souffrant d’inflammation chronique, la polyarthrite rhumatoïde est considérée comme un facteur de risque d’ostéoporose, c’est-à-dire d’une fragilité des os.
 

Facteurs favorisants

Pour le Dr Cohen, un autre bon moyen de ne pas confondre la polyarthrite rhumatoïde avec l'arthrose – la plus fréquente des maladies articulaires -, c’est l’âge de la personne touchée. “C’est le plus souvent une maladie de femmes jeunes ou d’âge moyen. Elles savent que leurs douleurs ne sont pas dues à l'arthrose qui apparaissent plus tardivement”, explique-t-il.

D’après l’Assurance maladie, la polyarthrite rhumatoïde toucherait 0,66 % de la population féminine contre 0,28% de la population masculine. Ce qui, selon le rhumatologue, pourrait s’expliquer par l’exposition plus fréquente des femmes au stress et à la dépression. “Les troubles psychologiques, les chocs émotionnels et la sédentarité affaiblissent les défenses immunitaires, favorisent l’aggravation du rhumatisme inflammatoire et augmentent le risque cardio-vasculaire”, ajoute le Dr Cohen.

Bien que les origines de cette maladie auto-immune soient inconnues, le tabagisme, l’obésité ou la génétique pourraient en être des facteurs prédisposants, indique Vidal. “Dans certains cas, elle peut aussi avoir un point d’appel infectieux. On sait notamment que la parodontite - une infection de l’os de soutien des gencives - peut fabriquer des substrats des anti-corps anti- CCP pouvant déclencher certaines polyarthrites rhumatoïdes”, note le rhumatologue.
 

Une prise en charge la plus précoce possible

Alors un traitement symptomatique à base d’antalgiques, (en évitant les opioïdes faibles ou forts source d’addiction) et d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) avec une protection gastrique sera déjà mis en place pour soulager la douleur et atténuer l’inflammation. Les infiltrations intra-articulaires de cortisone et les injections locales superficielles peuvent être très efficaces. “Chez les personnes ne s’exposant pas au soleil, la supplémentation régulière en vitamine D doit être systématique à doses quotidiennes ou mensuelles. Car on sait que le déficit en vitamine D est associé à une aggravation et à la sévérité des poussées de la polyarthrite rhumatoïde et de tous les autres rhumatismes inflammatoires comme le lupus, le syndrome sec de Gougerot-Sjögren, la spondylarthrite ou le rhumatisme psoriasique”, ajoute le rhumatologue. L’arrêt du tabac doit être préconisé.

S'ensuit alors la mise en route du traitement de fond - le méthotrexate – dans le but de stopper la maladie, pris une fois par semaine sous forme d’injections sous-cutanées ou de comprimés.

Selon le Dr Cohen, son efficacité est visible au moins deux mois après le début du traitement. “Les patients doivent être placés sous surveillance biologique régulière, supplémentés en acide folique et sous contraception. En cas d’inefficacité, le méthotrexate sera remplacé par la biothérapie, un progrès thérapeutique remarquable. En première intention par les anti-TNF et en cas d’échec, par des nouveaux traitements ciblés comme les anti-IL ou les inhibiteurs de JAK. Ce traitement qui est très onéreux doit être prescrit à l’hôpital, mais vous pourrez continuer à être suivi par votre rhumatologue pour une surveillance régulière et attentive.

Nous savons que l’activité physique régulière libère les fameuses endorphines (analogues à la morphine) et des myokines fabriquées par les muscles qui en se contractant, réduisent l’inflammation. Le rhumatologue le martèle : “contre la polyarthrite rhumatoïde, tout sport plaisir est recommandé, tout comme une bonne gestion du stress, un sommeil de qualité et une alimentation variée, saine et équilibrée, en fuyant les aliments industriels ultra-transformés et les sodas”. Il rappelle également que le curcuma a un effet anti-oxydant et anti- inflammatoire.